le lundi 4 juillet 2005

Le maire Lévesque rêve en pensant au lac Kénogami

« Le lac Kénogami est la clé de voûte de notre avenir », titrait Le Réveil en citant le maire Réjean Lévesque, de Larouche. Étonnante déclaration d’un premier magistrat dont la municipalité se transforme en perle de l’initiative privée ouverte sur la culture grâce à l’attachement du néo new-yorkais Claude Simard à ses racines saguenéennes.

On constate donc avec satisfaction que les visionnaires de Larouche ne sont pas des utopistes. Ils savent transformer les rêves en réalités. Le projet du maire Lévesque est le prolongement considérablement amplifié de l’exploitation, au maximum, des possibilités du potentiel énergétique du réseau hydrographique du lac-réservoir Kénogami.

Énorme potentiel

Outre l’immense barrage du Portage-des-Roches qui s’élève sur une hauteur de 24.3 mètres au-dessus des rivières Chicoutimi et Aux-Sables, ce complexe comprend 20 digues et autres ouvrages pour contrôler l’emmagasinement des eaux à un niveau que les Saguenéens de l’arrondissement Kénogami considèrent satisfaisant et leur écoulement vers les turbines d’Hydro-Jonquière, d’Elkem Metal et d’Abitibi-Consol. Il est évident que ce vaste bassin pourrait activer d’autres centrales hydroélectriques. Daniel Giguère, le dernier maire de Jonquière, l’avait d’ailleurs proposé dans son programme électoral. Quant au maire vainqueur, Jean Tremblay, il en a fait un élément du plan de développement économique de Ville de Saguenay.

Réjean Lévesque lance-t-il une idée vague ou s’apprête-t-il à présenter à la population régionale et au gouvernement du Québec les conclusions d’une analyse approfondie de la situation ? Dans les confidences faites au confrère Jean-Marc Tremblay, il veut simplement éveiller l’intérêt public au « potentiel hydroélectrique formidable » mais insuffisamment exploité.

Son imagination entend sonner les caisses enregistreuses de l’économie régionale enrichie de nouvelles centrales hydroélectriques à Laterrière et sur la Pikauba. Les bénéfices pourraient enfin permettre, émet-il, le creusage du réservoir de rétention dans la Réserve faunique des Laurentides que les Commissions Nicolet et Journault (Bape) ont proposé pour assurer la sécurité des quelque 7 500 riverains.

Délai de Dame nature

C’est cette hypothèse qui a davantage retenu mon attention dans la pensée du maire Réjean Lévesque car il n’a pas encore expliqué comment il concilierait la loi de la nationalisation de l’électricité avec son objectif « d’injecter les faramineux profits dans notre économie ». Certes, un projet de création d’un bloc d’énergie patrimonial pour le développement régional flotte dans l’air, mais c’est une autre qu’il faudra examiner dans une autre réflexion.

Entre temps, rappelons que c’est à l’été 2000 que l’ancien premier ministre Lucien Bouchard et son titulaire des Ressources naturelles, Jacques Brassard, confiaient à Hydro-Québec la construction d’infrastructures comprenant l’aménagement d’un réservoir-éponge sur la Pikauba, pour assurer la sécurité des populations vivant autour et en aval du grand lac Kénogami. Selon l’échéancier tracé par Québec, tout ce programme conçu par les dirigeants politiques qui avaient vécu quotidiennement les conséquences du Déluge de 1996 serait maintenant une réalité.

Depuis son élection, le gouvernement Charest a modifié les choix budgétaires de l’État et de sa créature Hydro-Québec en fonction d’autres intérêts. Mais l’ancienne mairesse de Laterrière, Françoise Gauthier, aujourd’hui députée-ministre de Jonquière et leader politique du Saguenay-Lac-Saint-Jean, a indiqué, en mars dernier, par l’intermédiaire de son attaché politique Jean-Sébastien Roy, que le ministère des Ressources naturelles examinait « d’autres solutions, moins coûteuses, pour régler cette situation. »

Depuis, c’est le silence… Dame nature veut bien aussi accorder un délai en réservant à d’autres populations ses sautes d’humeur. Mais si les bonnes intentions de l’autorité politique actuelle s’évanouissent dans des considérations obscures, une fonte trop rapide des neiges au printemps ou des pluies diluviennes ressusciteront éventuellement le spectre d’une autre catastrophe.