le Mercredi 19 juillet, 2006
Lac Kénogami : la fin d’une longue bataille
Faut-il parler d’un miracle? Ou, de façon plus terre-à-terre, du fruit d’un travail laborieux, acharné? Toujours est-il qu’après une bataille ayant duré pas moins de 25 ans, les riverains du lac Kénogami obtiennent enfin gain de cause!
La ministre du Tourisme et députée de Jonquière a choisi la chapelle de Saint-Cyriac pour y convoquer la presse. Les prières des citoyens de ce secteur à haut potentiel touristique ont été exaucées, d’où, sans doute, le choix d’un lieu de culte historique pour annoncer la bonne nouvelle.
Depuis les tragiques inondations de juillet 1996, le mouvement de revendications des citoyens du secteur allait en s’accélérant. Québec n’avait donc plus le choix d’agir dans le sens souhaité par les contestataires, au risque d’être confronté à une véritable révolte.
L’atmosphère de fête ayant caractérisé l’événement tranchait de façon significative avec les différents témoignages qui soulignent, depuis la fin de semaine, le 10e anniversaire du Déluge. La coïncidence, entre l’annonce d’hier et le rappel des faits qui ont entouré l’un des pires désastres à s’abattre sur le Saguenay-Lac-Saint-Jean, est loin d’être fortuite, on s’en doute.
En effet, simultanément à l’annonce concernant le niveau du lac Kénogami Françoise Gauthier a confirmé que son gouvernement entreprendra, au cours des prochains mois, le creusage du lit de la rivière aux Sables. L’opération, qui prendra fin en 2010 après un investissement de 15 millions $, permettra d’accroître la sécurité des citoyens vivant dans des zones inondables.
Changement de programme
Selon la députée-ministre, un tel changement de programme ne veut pas dire nécessairement que Québec abandonne le projet de construction d’une digue dans le Parc des Laurentides. Il en faudra davantage, cependant, pour convaincre définitivement les sceptiques que cette seconde option éliminera tout danger potentiel. Une autre importante question est demeurée sans réponse au cours de cette rencontre. Françoise Gauthier n’a pas été en mesure de préciser la manière dont Elkem Métal, un partenaire incontournable dans cette négociation, sera dédommagée pour la perte d’énergie encourue.
Les mines réjouies de Réjean Laforest et de Paul-Roger Cantin, respectivement président de l’arrondissement de Jonquière et conseiller du secteur, en disaient long, hier, sur leur haut degré de satisfaction. Leur physionomie démontrait que le sort du réservoir Pikauba ne figurait pas dans leurs
préoccupations du moment. Une réaction fort compréhensible… Pour le premier, la fin de la saga relative au niveau du lac ouvre la porte à un vaste développement récréo-touristique et domiciliaire; le second, qui a fait toute sa campagne électorale sur le thème « un lac plein avec Cantin » (simple, mais diablement efficace!), il s’agit de la concrétisation d’un engagement.
Anecdote savoureuse, les participants à la conférence de presse, à leur entrée dans la chapelle, ont tous emarqué l’invitation qui leur était faite, du haut de l’autel et en caractères imposants, de « …se laisser guider par l’Esprit ». Le mot, partie intégrante du décor habituel du lieu de culte construit en 1902, en a fait sourire plusieurs. Car les libéraux auront sans aucun doute besoin de beaucoup d’inspiration (sinon d’un miracle?) au cours de la prochaine campagne électorale pour convaincre leurs ouailles que, cette fois, ils sont vraiment prêts à célébrer la messe!
En tout cas, une chose est sûre : Françoise Gauthier vient de se faire beaucoup de fidèles à lac Kénogami; en attendant, peut-être, de décrocher son auréole permanente à l’issue de la prochaine campagne électorale générale, elle peut toujours revendiquer, d’ici là, un statut de bienheureuse.
Un peu d’histoire…
Pour l’histoire, enfin, et puisque la saison estivale se prête bien à un tel rappel, notons que la chapelle de Saint-Cyriac tire une partie de son nom du premier colon à s’être établi sur les rives du lac Kénogami, un certain Cyriac Buckell. Elle a été construite au coût faramineux de 4565,24 $! Le village lui ayant donné son nom, et qui tirait sa subsistance de l’exploitation de la forêt, a été inondé en 1924, lors de la construction des grands barrages. Les habitations de l’époque reposent, depuis, sous 30 pieds d’eau. …ce qui donne une petite idée de ce qu’était le lac d’origine, avant de devenir un vaste réservoir aux rives changeantes puis, de nouveau, un lac sans marées saisonnières!