La soupape de Pikauba demeure indispensable


le lundi 7 juin 2004

Commentaire

La soupape de Pikauba demeure indispensable

Qu’attend donc le gouvernement québécois pour donner suite à la recommandation du Bureau d’audiences publiques en environnement (BAPE), de creuser un réservoir sur la rivière Pikauba pour régulariser les crues du lacKénogami ?

Dans leur rapport diffusé en novembre dernier, les commissaires considèrent que la réalisation de cet ouvrage est la seule solution au problème des variations inquiétantes du niveau d’eau de ce grand lac, utilisé comme réservoir pour faire tourner les turbines de trois centrales hydroélectriques.

Depuis, l’autorité politique est demeurée silencieuse. Le ministre Thomas Mulcair, titulaire de l’Environnement, a maintenu le mystère, la semaine dernière, quand il a indiqué sa volonté de respecter le niveau idéal de 113,5 pieds mais sans mentionner que, le moyen pour y parvenir, c’est d’ajouter un réservoir de rétention dans la Réserve faunique des Laurentides.

Tout en applaudissant face à cette détermination, le conseiller Réal Godin, représentant de l’ancienne municipalité de Lac-Kénogami à Saguenay, reproche aux fonctionnaires du Centre d’expertise hydrique de manifester une prudence excessive. Ils ouvrent les pelles toutes grandes, a-t-il raconté au confrère Denis Villeneuve, au risque de réduire le niveau jusqu’à 111 pieds si le beau temps persiste durant une période prolongée.

Nécessité

Intrigué par cette vision de la situation, Le Quotidien a demandé à l’ancien maire de Lac-Kénogami s’il considère toujours nécessaire la réalisation du projet de régularisation avec l’aménagement d’un réservoir tampon sur la rivière Pikauba lancé par le gouvernement péquiste de Lucien Bouchard le 11 juin 200. « Plus que jamais », a-t-il répondu. Sans l’effet de ces travaux demeurés en plan après l’accession au pouvoir de l’équipe Charest, il reconnaît la difficulté de concilier les vocations multiples de cet ensemble hydrographique et satisfaire les quelque 7500 riverains du lac et ceux des rivières aux Sables et Chicoutimi.

Jean-Marie Beaulieu, qui fut maire de Laterrière, partage la même analyse. Et la députée-ministre de Jonquière, Françoise Gauthier, qui était maire de cette municipalité maintenant intégrée à Saguenay, n’a jamais exprimé d’opinion contraire. Pourquoi donc, devant cette belle unanimité, Québec retarde-t-il tant à donner le feu vert à Hydro-Québec?

L’oeuvre inachevée

Rappelons-nous que c’est à la société d’État que le gouvernement Bouchard avait confié la réalisation des travaux visant à « assurer la gestion sécuritaire des crues du bassin versant du lac Kénogami ». Le programme comprenait, outre la construction d’un réservoir sur la rivière Pikauba, la consolidation et la modernisation des ouvrages existants autour du lac-réservoir et l’aménagement d’un seuil à la partie supérieure de la rivière aux Sables. Le gouvernement s’était fixé un horizon de cinq ans pour la réalisation du projet. L’échéancier ne devait pas excéder trois ans, soit jusqu’à la fin de 2005.

L’argent requis devait être puisé dans le fonds spécial constitué pour les régions sinistrées lors des pluies diluviennes de juillet 1996. Le gouvernement Bouchard entendait bien cependant entreprendre des démarches auprès d’Ottawa pour obtenir sa contribution.

Hydro-Québec s’empressa d’exécuter la commande de son unique actionnaire, le gouvernement du Québec. Elle a consacré une cinquantaine de millions de $ à la réfection des barrages élevés à Pibrac et au Portage-des-Roches, puis à la consolidation des digues existantes ainsi qu’à l’addition de quatre nouvelles toujours dans l’optique d’une sécurité accrue.

Avec un Thomas Mulcair qui veut appliquer à ses responsabilités ministérielles le sceau de l’efficacité, la consultation sur le projet Pikauba n’a duré que 10 mois, un précédent historique. Mais c’est le gouvernement qui se traîne les pieds maintenant. Comme s’il se prêtait à la tentation de détourner les crédits vers d’autres chantiers en entretenant l’illusion que le retour d’un gardien permanent au Portage-des-Roches suffira à domestiquer une nature imprévisible.

Qu’il se rappelle seulement que le lac Kénogami est le seul réservoir de tout le réseau hydroélectrique du Québec à être dépourvu de la soupape de sécurité d’un canal d’évacuation. C’est le rôle indispensable que jouera l’éventuelle éponge de Pikauba.

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